Menaces hivernales pour les arbres canadiens : garder nos forêts urbaines et rurales en santé
Avec ses paysages enneigés et son air vif, l’hiver canadien est à couper le souffle, mais c’est une saison qui ne manque pas de défis pour nos arbres. Durant les mois les plus froids, les arbres urbains et ruraux sont confrontés à des menaces spécifiques qui peuvent avoir des conséquences sur leur santé et leur survie. Penchons-nous sur ces défis pour comprendre pourquoi ils sont importants et ce que nous pouvons faire pour aider nos arbres.
Le cycle de gel-dégel
Au Canada, l’hiver n’est pas seulement froid, il est imprévisible. Les cycles de gel-dégel sont l’une des plus grandes menaces pour les arbres en milieu urbain et rural. Pendant la journée, avec les températures plus chaudes, l’eau à l’intérieur des arbres fond, puis, la nuit, la chute des températures la gèle de nouveau. Cette succession d’expansions et de contractions peut mener à des gélivures : des fissures verticales dans l’écorce qui rendent les arbres plus vulnérables aux maladies, aux ravageurs et à d’autres dégâts.
Ce phénomène est parfois appelé « maladie du sud-ouest », car les branches ou les arbres exposés au soleil au sud-ouest subissent souvent les plus grands écarts de température. Généralement, ces fissures longent la branche et sont seulement esthétiques, à moins qu’elles ne restent ouvertes pendant plusieurs années et que de la moisissure s’y infiltre. Toutefois, les fissures horizontales sont bien plus graves et doivent être inspectées par un ou une spécialiste.
Les arbres qui ont une écorce fine comme les érables, les cerisiers et les jeunes chênes sont particulièrement sujets à ce problème. En milieu urbain, les arbres d’ornement ou les jeunes arbres sont les plus à risque, car ils manquent souvent de la protection du couvert forestier.
Que faire?
Une façon simple de protéger vos arbres vulnérables est de protéger leurs troncs avec des corsets ou de la toile de jute avant les grands froids. Cela agira comme une couche protectrice qui limitera les écarts de température et réduira les risques de gélivures.
Rue d’une banlieue canadienne en hiver après de fortes chutes de neige. Photo par Andrew, Adobe Stock.
Produits chimiques de déglaçage
Les produits chimiques de déglaçage permettent de sécuriser nos routes et nos trottoirs, mais ils peuvent poser une menace importante pour les arbres, en particulier en ville. Les sels de voirie, généralement du chlorure de sodium, de magnésium ou de potassium, abaissent le point de congélation de l’eau, ce qui permet de faire fondre efficacement la glace. Cependant, ils peuvent aussi s’infiltrer dans le sol, là où les racines des arbres peuvent l’absorber, ce qui détourne l’eau des racines et cause de la déshydratation.
Les éclaboussures de sel sur l’écorce et les bourgeons des arbres peuvent aussi entraîner des « brûlures de sel », qu’on reconnaît aux branches qui brunissent ou qui meurent. Dans certains cas, ces éclaboussures créent des « balais de sorcière », des amas anormaux de brindilles qui ressemblent à un balai. C’est un phénomène très courant près des routes à grande vitesse et des autoroutes.
Les arbres des rues urbaines, en particulier ceux plantés près des trottoirs, des stationnements et des routes, sont les plus à risque. Des espèces communes comme les tilleuls, les pins, les cèdres et les épinettes sont souvent celles qui subissent le plus grand stress lié au sel.
Que faire?
Pour réduire les dommages causés à vos arbres, envisagez d’utiliser des produits de déglaçage respectueux de l’environnement, comme l’acétate de magnésium calcique, qui sont moins nocifs pour les arbres. Si vous remarquez des dommages liés au sel, rincez la zone touchée avec de l’eau au début du printemps pour éliminer le sel. Faites attention à l’endroit où vous empilez la neige quand vous dégagez votre allée ou la route : évitez de l’entasser près des arbres si possible.
Fortes chutes de neige sur les fines branches d’un arbre. Photo par labalajadia, Adobe Stock.
Neige abondante et verglas
Les chutes de neige abondantes et les tempêtes de verglas font partie des hivers canadiens, mais pour les arbres, le poids de la neige et le verglas peuvent être un important fardeau. La neige peut s’accumuler sur les branches, qu’elle peut courber ou casser si elle est mouillée et lourde. Les tempêtes de verglas peuvent recouvrir les branches d’une fine couche de glace, ce qui pèse sur les branches et peut les casser. Lorsque les branches cassent, elles créent une blessure ouverte qui rend les arbres vulnérables aux ravageurs et aux maladies.
Les arbres avec une canopée dense, comme les conifères (cèdres, pins et épinettes), sont particulièrement sensibles à l’accumulation de neige qui pèse sur leurs larges branches. Les arbres fruitiers sont également à risque, car ils ont tendance à pousser en largeur plutôt qu’en hauteur. Il en va de même pour les arbres qui ont de grandes branches horizontales. En milieu urbain, les jeunes arbres avec de petites branches et des jointures serrées sont particulièrement vulnérables, car il est plus facile de casser la branche principale.
Que faire?
L’élagage est une bonne mesure de prévention. Retirez les branches faibles ou surplombantes à la fin de l’automne pour réduire la probabilité qu’elles se cassent. Pour les arbres jeunes ou vulnérables, secouez-les doucement pour faire tomber l’excès de neige après une tempête, mais évitez d’essayer d’enlever la glace, car vous risquez de casser les branches dans le processus.
Le lapin de l’Est (Sylvilagus floridanus) grignote un arbre en hiver. Photo par Mircea Costina, Adobe Stock.
Petites bêtes affamées
L’hiver est une période difficile pour la faune et certaines créatures se tournent vers les arbres pour trouver de la nourriture et un abri. Les petits animaux comme les souris, les campagnols et les lapins mangent souvent l’écorce des jeunes arbres quand la nourriture se fait rare. L’annélation, lorsque l’écorce autour de l’arbre est entièrement mangée, peut être fatale. Elle perturbe la capacité de l’arbre à transporter des nutriments. En milieu rural, les cerfs peuvent causer des dommages en grignotant les bourgeons et les branches basses.
Les jeunes arbres à l’écorce fine sont les plus vulnérables. Les arbres récemment plantés dans des parcs et des jardins sont souvent les premières cibles. Les arbres à fruits et à noix sont également à risque, surtout s’ils ne sont pas entourés d’une clôture.
Que faire?
Utilisez des corsets d’arbres ou une clôture autour de la base de l’arbre pour empêcher les animaux de manger l’écorce. En milieu rural, appliquer un répulsif non toxique peut décourager les cerfs de se nourrir des jeunes arbres.
Brûlure hivernale sur les pointes d’un arbre. Photo par Amelia, Adobe Stock.
La menace cachée de l’hiver
Cela peut sembler étonnant, mais la sécheresse de l’hiver peut être un vrai problème pour les arbres, en particulier les conifères. Lorsque le sol gèle, les arbres ne peuvent plus accéder à l’eau dans le sol, même s’ils continuent à perdre de l’humidité par la transpiration. Cela peut causer une brûlure hivernale, c’est-à-dire que les aiguilles brunissent et meurent, surtout dans les zones exposées à de forts vents secs.
Les conifères comme les pins, les épinettes et les sapins sont les plus touchés, notamment ceux qui sont exposés à de violents vents hivernaux. Les arbres ruraux en zone ouverte et les arbres urbains dans les rues venteuses sont les plus à risque.
Que faire?
Arroser abondamment les arbres à la fin de l’automne avant que le sol gèle peut limiter les risques. Installer du paillage autour de la base des arbres peut aussi contribuer à retenir l’humidité du sol et à réguler la température du sol. Pour les conifères, mettre en place un coupe-vent, comme de la toile de jute, peut réduire l’exposition au vent.
Donner un coup de pouce à nos arbres
Les arbres canadiens sont confrontés à plusieurs menaces durant l’hiver, des cycles de gel-dégel aux animaux affamés. Qu’ils soient dans un parc urbain ou un paysage rural, les arbres sont essentiels à notre environnement, et ils ont besoin que nous en prenions soin pour survivre aux défis de l’hiver.
En ayant conscience de ces menaces et en prenant quelques mesures simples (pailler, utiliser un produit de déglaçage respectueux de l’environnement, protéger les jeunes arbres et élaguer stratégiquement), nous pouvons aider nos arbres à passer les mois les plus durs de l’année. Ainsi, nous protégeons la santé de nos forêts, mais nous garantissons également que nos paysages urbains et ruraux continuent d’apporter les bienfaits sur lesquels nous comptons, d’un air pur à des écosystèmes florissants.
Un peu de préparation peut faire beaucoup. Nos arbres nous en remercieront le printemps venu!
Retour à tous les articles