Comment les communautés canadiennes font face à la menace de l’agrile du frêne

Tree Canada

Originaire de Chine, l’agrile du frêne (AF) est une espèce envahissante qui ne connaît aucun prédateur naturel en Amérique du Nord. Il est ainsi devenu une menace dévastatrice pour les frênes nord-américains (Fraxinus). Les villes de l’Est canadien ont été gravement touchées et perdent des milliers de frênes à cause de cet insecte. Plusieurs villes, organisations et scientifiques canadiens s’efforcent de combattre ce fléau et de sauver les frênes.

L’Ontario et le Québec sont présentement les seules provinces du pays infestées par l’agrile du frêne, mais d’autres provinces se préparent à sa progression à travers le pays. La Ville d’Ottawa (Ontario) a été grandement touchée par l’AF. Les frênes représentent 20 à 25 % de la forêt urbaine et rurale d’Ottawa (Stratégie de lutte contre l’agrile du frêne de la Ville d’Ottawa, 2013) et selon Arbre Ottawa, la capitale pourrait perdre 25 % de sa canopée au cours des 3 à 5 prochaines années (Écologie Ottawa). L’AF a également frappé la ville de Montréal (Québec). En octobre 2016, on dénombrait plus de 13 000 frênes tués par l’insecte à Montréal (CBC 2016), où un arbre sur cinq est un frêne. La Ville estime par ailleurs que 200 000 frênes situés sur des propriétés publiques sont susceptibles d’être infestés par l’AF (CBC, 2016). Les villes mettent tout en œuvre pour sauver les frênes, y compris celles qui n’ont pas encore été frappées par le problème, mais qui se préparent à l’arrivée des coléoptères.

De nombreuses villes et municipalités intègrent ainsi la lutte contre l’AF dans leurs plans de gestion de foresterie urbaine (PGFU). Les villes d’Ottawa et de Montréal enregistrent des pertes de canopée dont l’agrile du frêne est directement responsable, c’est pourquoi elles ont toutes deux intégré à leurs PGFU des stratégies visant à faire face à ce problème. Afin de gérer les conséquences de l’AF, la stratégie de la Ville d’Ottawa consiste à mettre en place ” des plantations d’arbres de remplacement proactives, des injections d’arbres sélectives, des enlèvements d’arbres, le déplacement et l’élimination du bois ainsi que des actions de sensibilisation du grand public ” (Ville d’Ottawa, 2013). La Ville de Montréal (Québec) dispose quant à elle d’un règlement destiné à aider à limiter la propagation de l’AF. Ce règlement explique comment identifier et traiter ce ravageur, mais aussi comment éliminer les frênes infestés. Il prévoit par ailleurs des subventions visant à aider la population à se débarrasser des frênes morts. Ces deux villes ont également inclus le bois de frêne dans leur planification urbaine : Ottawa utilise les frênes abattus pour construire des stations de train léger, tandis que Montréal les transforme en bancs publics et en bacs à fleurs (CBC, 2016).

L’agrile du frêne n’a pas encore atteint le Manitoba ni la Nouvelle-Écosse, mais les villes de ces provinces commencent déjà à inclure des mesures de prévention en matière de lutte contre l’AF dans leurs PGFU. Ainsi, la Ville de Winnipeg (Manitoba) a intégré des dispositions à son PGFU en vue de tenter de limiter les pertes de frênes et de sauver la canopée urbaine. La Direction de la foresterie urbaine de Winnipeg recense tous les frênes appartenant à des propriétaires privés afin de déterminer la quantité de canopée urbaine susceptible d’être perdue. Dans son PGFU, la Ville d’Halifax (Nouvelle-Écosse) affirme que la menace de l’agrile du frêne ” se profile à l’horizon ” (Ville d’Halifax, 2013) et prend des mesures destinées à préparer sa forêt urbaine à lutter contre ce fléau. Des organisations contribuent également à limiter les impacts de l’AF en proposant des subventions et des programmes visant à traiter les frênes.

Parmi elles, on retrouve les organismes sans but lucratif Arbres Canada (au niveau national) et LEAF (dans la Ville de Toronto). À l’échelle nationale, Arbres Canada propose des subventions et des programmes pilote : en 2016, l’organisme a ainsi offert 3 $ par centimètre de diamètre de tronc aux propriétaires privés de frênes pour qu’ils les traitent avec du TreeAzin, un insecticide capable de tuer l’AF. LEAF (Local Enhancement and Appreciation of Forests), un organisme sans but lucratif basé à Toronto, a mis en place un programme nommé Youth EAB Ambassador (” Jeune ambassadeur de l’AF “), un atelier qui sensibilise les enfants à l’importance de la forêt urbaine et à la menace représentée par l’agrile du frêne. Les scientifiques et les chercheurs s’associent aux villes et aux organisations pour sauver les frênes.

Nombre d’entre eux au pays s’efforcent de trouver des solutions à ce fléau. L’agrile du frêne est une espèce envahissante qui ne connaît aucun prédateur naturel en Amérique du Nord, mais une guêpe parasite appelée Tetrastichus, élevée à Sault Ste. Marie par le Centre de foresterie des Grands Lacs, redonne de l’espoir. Ces guêpes pourraient contribuer à maîtriser le ravageur en pondant leurs œufs dans les larves d’AF, les empêchant ainsi d’arriver à maturité. Sans constituer une solution au problème, ces guêpes pourraient toutefois aider à limiter les impacts de cet insecte envahissant. Des tests très approfondis ont été menés sur les guêpes Tetrastichus afin de veiller à ce qu’elles ne présentent aucun effet négatif sur l’environnement et sur l’homme. Le Centre de foresterie des Grands Lacs a pour objectif d’élever environ 12 000 de ces guêpes (CBC 2017). Au-delà des subventions, de la recherche et des programmes, il existe d’autres moyens de contrôler l’agrile du frêne. Ressources Naturelles Canada (RNCan) dispose de nombreuses informations à ce propos et recommande notamment les traitements suivants : l’émondage sélectif, les pièges à agrile du frêne et l’insecticide.

L’AF se propage principalement via les hommes qui déplacent du bois de chauffage et d’autres produits à base de frêne tels que des emballages en bois. C’est pourquoi la probabilité de prolifération de ces coléoptères à travers le Canada est très élevée. Selon RNCan, l’infestation des régions déjà envahies a de fortes chances de progresser et, la plupart des villes canadiennes présentant une forte concentration de frênes en zone urbaine, la majeure partie des forêts urbaines devraient être réduites de manière significative. La Commission de la capitale nationale à Ottawa (Ontario) prévoit d’abattre près de 12 500 frênes infectés d’ici 2018 et de les remplacer par 13 000 nouveaux arbres (Ottawa Citizen, 2015). Malgré ces sombres perspectives, les traitements et le reboisement contribuent à reconstituer la canopée urbaine.

De nombreux frênes sont abattus à cause de l’agrile du frêne, mais ils sont remplacés par d’autres espèces d’arbres afin de garantir aux Canadiens un environnement toujours aussi vert. Grâce aux scientifiques et à la mise en place de mesures de réduction des risques via les PGFU municipaux, les frênes continueront à faire partie de notre canopée urbaine. Gardons l’espoir que nous serons prochainement en mesure de contrôler la population d’agrile du frêne afin de permettre aux frênes de s’épanouir en pleine santé.

Sources :

Ville d’Ottawa, stratégie de lutte contre l’agrile du frêne : https://documents.ottawa.ca/sites/documents.ottawa.ca/files/documents/eab_strategy_en.pdf
Ville de Winnipeg, stratégie de lutte contre l’agrile du frêne : http://www.winnipeg.ca/francais/publicworks/parksOpenSpace/UrbanForestry/EmeraldAsh.stm
Ville d’Halifax, plan de gestion de la forêt urbaine (PGFU) : http://www.halifax.ca/property/ufmp/documents/secondeditionhrmufmp.pdf
Ville de Montréal, règlement relatif à l’agrile du frêne : http://ville.montreal.qc.ca/portal/page?_pageid=7377,142097470&_dad=portal&_schema=PORTAL
Utilisation des frênes à Montréal : http://www.cbc.ca/news/canada/montreal/montreal-emerald-ash-borer-public-1.3807627
Programme de lutte contre l’agrile du frêne d’Arbres Canada : https://arbrescanada.ca/operationrenouvert/operationrenouvert-agrile-du-frene/
Programme de jeune ambassadeur de l’AF : http://www.yourleaf.org/youth-eab-ambassador-program
Site du gouvernement canadien contenant des informations sur les actions de lutte contre l’agrile du frêne : https://www.rncan.gc.ca/forets/feux-insectes-perturbations/principaux-insectes/13378
CBC News, des guêpes tueuses contre l’agrile du frêne : http://www.cbc.ca/news/canada/sudbury/canadian-wasps-on-battlefront-1.4032275
CBC News, des guêpes tueuses contre l’agrile du frêne : http://www.cbc.ca/news/canada/manitoba/wasps-fight-emerald-ash-borer-beetles-1.4035333
Réseau d’informations sur l’agrile du frêne : http://www.emeraldashborer.info/index.php
Ottawa Citizen, arbres de remplacement du CNC : http://ottawacitizen.com/news/local-news/ncc-wont-replace-most-diseased-ash-trees-it-cuts-until-2018-or-later-report-says-with-video
Écologie Ottawa : https://ecologieottawa.ca/arbre-ottawa/

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